J'ai beau avoir tourné la question dans tous les sens et avoir pris de la distance face aux demandes de paraitre qu'on impose aux femmes, je continue d'avoir mal aux tripes chaque fois que je vois le reflet de comment la société perçoit les femmes rondes.
Et pas que pour nous. Pour toutes les femmes pour qui on mesure la valeur à leur capacité à avoir les dimentions d'un trophé de chasse masculine. Pour toutes les petites filles qui mesurent leur valeur à leur capacité d'attirer le regard masculin sur la mince ligne ou elles seraient sexys sans être taxées de femmes non respectables, donc utilisables. On a fait des femmes des images à utiliser selon les envies et les grosses ne correspondent pas aux envies qu'on vend, pas même comme objet sexuel. Surtout pas.
J'ai passé mon adolescence à me croire coupable de ne pas pouvoir être de ces femmes qui peuvent servir les envies des hommes, de ne pas correspondre aux douces créatures dont mes écrivains préféré tombaient amoureux au premier regard, comme si la beauté des femmes était leur principale qualité. C'est un jugement pénible pour toutes, puisque la beauté juvénile est inmanquablement destinée à se flétrir puis à faire tomber celles qui l'ont un jour détenue l'anonymat, comme leur consoeurs déjà invisibles de ne pas être belles. La littérature, lieu de tous les imaginaires et de toutes les constructions de pensée, n'est pas souvent un lieu de liberté et de possibles pour les femmes.
Le cinéma peut-être, alors?! Ce lieu où il est possible de voler, de sauver la terre, de se métamorphoser live, de faire à peu près n'importe quoi en restant parfaitement coiffée? Hummm...
Je reviens de quelques long vol, ou j'ai eu le loisir d'écouter presque l'entièreté de la programmation d' "AirFrance et ses partenaires Skyteam" pendant que ma fille jubilait de pouvoir écouter la Reine des Neiges en boucle.
Il n'y a pas que des gens beaux au cinéma, même chez les gentils. Il est de mise dans le cinéma français de présenter des hommes qui ne feraient pas l'unanimité niveau esthétique même comme principal protagoniste. Mais ne cherchez pas les femmes ordinaires chez les dames qui, à moins d'être belle mère ou sorcière, se doivent d'être magnifiques.
J'ai donc écouté mon lot de film d'amour Skyteamiens. Les fille était toujours fragiles, malades et incroyablement belles et les hommes, courageux, virils et éperduement amoureux au premier regard, près à tout pour conquérir des femmes qui méritent qu'on luttent pour elles, qu'on les gagne et idéallement, qu'on les possède ensuite pour la vie. La nouveauté de l'époque, c'est que les femmes peuvent être fortes si mignonnes, sous l'aile protectrice d'un encore plus fort qu'elles. Le patriarcat change ses vêtements.
J'avais déjà ma dose de rires découragés lorsque j'ai entamé l'écoute de Fiston. Qui m'a écoeuré au possible. J'aurai aimé voir quelqu'un partager mon énervement féministe, mais tout ce qui se trouve sur le net sont des critiques du genre: "Très bonne petite comédie légère: pas de gros mots, pas de vulgarité, pas de farces pipi-caca-poil, simplement une histoire qui nous a fait sourire du début à la fin. Ce film ne passera pas à l'histoire mais il a le mérite d'être amusant et divertissant, de plus les acteurs y font un excellent travail et les paysages sont parfois très très beaux."
Au risque de passer encore pour cette féministe-mal-baisée-sans-humour, je n'ai pas souri devant ce parfait exemple de culture patriarcale et du viol célébrée pendant tout le film. J'ai surtout pensé au public non averti de filles qui ne ressemblent pas à Véronica Valenti et qui se font rabaisser de toutes les façons pendant le film, en tant que Moches sur lesquelles même un moche comme fiston ne pourrait pas baisser les yeux. (Mais qu'il accepte tout de même d'utiliser pour se pratiquer à séduire...)
J'ai aussi eu de la peine pour la minorité de Véronicas Valentis de ce monde aussi, trophés de chasse de chasseurs débiles, pour lesquels il est acceptable de poser des geste criminels. Dans un parfait exemples de culture du viol, Fiston s'immisce chez la fille qu'il aime, se photographie près d'elle en train de l'embrasser pendant qu'elle dort puis lui fou la peur de sa vie, sans le vouloir bien sur. Et, en bon film symptôme de culture patriarcale, que fait Véronica Valenti quand elle apprends que c'est fiston qui s'était introduit chez elle? Elle est en colère pour un bon 3 secondes, puis l'embrasse et lui offre son corps. Ben oui. Mais Fiston réalise ensuite qu'il ne veut plus d'elle. Il est un Homme maintenant, un Vrai. Soupir.
Malgré ça, malgré tout ça, il y a des jours où, dans ma condition de femme, j'aimerais être un trophé de chasse plutôt que d'être au mieux invisible.
Invisible pour le milieu de la mode, qui semble vraiment déterminé à ne faire des jolis vêtements que pour celles qui les mettrons, à leurs yeux, en valeur, challengeant même la logique du capitalisme qui voudrait qu'ils vendent au plus grand nombre. Comme si les rondes ne pouvaient pas contribuer à une image de marque et être jolies...
Invisible pour bien des gens aussi... Anyway.
samedi 7 juin 2014
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1 commentaire:
Bonjour
Excellent article , qui décrit effectivement la réalité des rapports homme - femme , une fille se doit avant tout d'être belle , et d'attendre que son prince charmant vienne .... les mythes ont la vie dure.
Merci pour cette lecture
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