vendredi 22 août 2008

Notre boulimie et nos toilettes en deux sujets distincts


C'est fou ce que j'ai de l'espace pour grandir et pour de nouvelles idées maintenant que je ne pense plus en permanence à des sujets reliés à l'amaigrissement, à l'autodénigrement qui allait avec quand je n'y arrivais pas de la facon prevue ou à la bataille mentale qui m'occuppait l'esprit lorsque j'y arrivais trop bien. Rien jusqu'ici dans ma vie ne m'aura permi une telle transition de pensées que de me donner le droit de m'écouter. Maintenant, il y a de la place dans ma vie pour celle que je suis au présent.

Je suis de retour à la maison, en train de ressasser mes souvenirs guatémaltèques et de préparer l'année scolaire qui vient. En fait, je ne suis pas revenue entière d'Amérique Centrale: une part de moi y est restée et je ne commence qu'à peine à m'en appercevoir.

Pendant un petit mois et demi, j'ai vécu avec beaucoup moins que d'habitude et je me suis pourtant sentie beaucoup moins vide que ces jours qui me laissent vidés d'être si remplis.

Quand on s'écoute vraiment, on a besoin de si peu. Pourtant, on consomme souvent à outrance pour remplir les vides laissés par ces petits besoins négligés. Je me suis gavée d'aliment mais il m'arrive encore souvent de me gaver le corps et l'esprit de choses qui, au fond, m'encombrent. Et je ne suis pas seule: j'ai vraiment cette impression depuis le retour d'être au sein d'une société completement boulimique de possessions, d'activités, d'émotions fortes, de thrill, de bonheur même. Et pourtant...

J'ai l'impression que plus on cherche à suremplir sa vie, plus on s'éloigne de ce qui nous fait sentir vraiment bien.

Après tout, on ne peut se nourrir que de ce qui nous manque. C'est comme pour l'alimentation. Le surplus s'accumule, nous alourdit et on recherche en vain ce plaisir des premières bouchées qu'on ne retrouvera jamais dans l'excès. Savourer, c'est le secret de l'équilibre, et pas que dans l'assiette.

Ne croyez pas que je n'apprécie pas l'eau chaude de ma douche, la programmation de ma maison de la culture et tous les avantages de vivre au Canada, au contraire. Je jouis de la vie d'ici avec un plaisir quasi orgasmique depuis que je suis rentrée à la maison. Je me dis juste que parfois, ici, on tombe trop aisément dans le trop et que ça nous fait du tord. (et pas qu'a nous: aux autres peuples aussi, comme à la terre...)

J'étais à l'aéroport à Atlanta lundi à attendre mon deuxième vol et après avoir feuilleté avec amusement les briques de la librairie qui expliquent en quelques millions de pages comment se simplifier l'existence, revenir à l'essentiel ou cesser de consommer inutilement (sic), je suis passée aux toilettes pour vivre pleinement mon choc culturel.


Je suis certaine qu'il s'en est fallu de peu pour que les madames en train de se poudrer le nez n'appelle pas la sécurité en me voyant sursauter puis rire comme une personne dérangée mentalement en regardant le distributeur de papier à main automatique. Laissez moi vous dire, ça fait tout un effet de pisser dans une toilette qui se flush toute seule ou on peut jetter le papier dans la cuvette et de se laver les mains sous un jet d'eau chaude parfaitement tempérée qui ne coule que lorsque mes mains sont en dessous, mais je n'étais pas préparée à ce que le distributeur de papier à main me sorte et me coupe une portion individuelle de joli papier blanc dans les mains. Ça, non, définitivement pas. C'était une expérience si éclairante que j'ai forcé mon amoureux et son apathie à aller voir la technologie des toilettes des hommes. Ce qui est bien, c'est qu'il veut toujours m'épouser malgré ça...

(D'ailleurs, ça me fait encore bizarre de jetter le papier dans la cuvette. Il faudra que quelqun m'explique ou il va ce papier, dans les égoûts, ce qu'on en fait ensuite et pourquoi tout ça ne bouche pas. Il y a un plombier dans la salle?)

Ensuite, nous sommes arrivés à New York, ville de tous les excès. La veille, j'étais à Nebaj, dans la tranquilité de la cordilière des Cuchumatanes, avec le peuple Ixil et ses moutons. Si vous me trouvez un tantinet illuminée et moralisatrise, c'est que le sourrire comparé de ces deux peuples a de quoi faire réfléchir.
Apprivoiser le vide, c'est probablement se rapprocher de l'essentiel, si subtil et volatile. Je ne sais pas si j'aurai beaucoup le temps d'écrire dans les prochains mois, avec cet excitant début de cours, mais comme j'ai déjà pas mal de talent et de pratique dans le combat et la vie à bras le corps, je crois que je vais me laisser aller vers plus de simplicité. C'est tout naturellement une extention de cette démarche commencée avec l'anti-régime: s'écouter pour déguster pleinement dans la mesure de ses besoins. Simple, logique, sain, équitable et franchement agréable.











Edit: Une image vaut mille mots: merci myrtille!


Autoportrait à la frontière, Frida kahlo

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Ton texte d'aujourd'hui viens me chercher et me semble être une perle de sagesse. Ta façon d'expliquer si simplement ce que l'anti-régime est, ce qu'il apporte et a quel point ce n'est pas *seulement* relié a la nourriture est tout a fait rafraichissante.

Merci ! Et je te souhaite de profiter pleinement de ta rentrée et de cette nouvelle aventure qui t'attend.

Karine =)

La Souimi a dit…

Bon retour à toi, Vertige!
Oui, le vide... Ce qu'on peut le découvrir, de toutes sortes de façons, lorsqu'on décide d'y faire face. Ce qu'on peut même le provoquer, car on y prend goût...

myrtille81 a dit…

Ton message m'a fait penser à un tableau de Frida kahlo "autoportrait à la frontière".
Je ne sais pas mettre le lien, mais tu peux le voir si tu veux sur google image.

Anonyme a dit…

Ah...
Ton texte est précis et tellement "rempli".
Merci.
Ça me rejoint beaucoup ces temps-ci. Avec un retour au travail bien rempli, ça contraste un peu fort avec mon vide-bien-plein au chalet.
Je n'oublierai pas ce que tu écris ici: s'écouter.
On a beau l'apprendre à nos dépens, on l'oublie vite parfois.
Promis, je ne l'oublierai pas.
S'écouter. Merci!

Vertige a dit…

Karine: Merci Beaucoup! Je ne sais pas si tu expérimente tout ça toi même mais c'est vrai que cette approche est raffraichissante!

Souimi: Tu as bien raison! Faire face à tout, même a rien, ça fait grandir et ça s'apprend!

Myrtille: C'est exactement ça! Quelle culture!

Beauté: On l'oublie malheureusement toutes par moment... Tu viendras me raffraichir la mémoire quand ce sera mon tour? hihi.