Je n'écris pas, je sais.
C'est que mon frère est chez moi et qu'il est en psychose. J'ai passé mes derniers jours à l'urgence avec lui. J'avais promis de ne pas le laisser là bas, alors j'ai tenu ma promesse en restant avec lui alors qu'ils le forçaient à rester.
Mon petit frère à été choisi par Dieu en personne pour gouverner le monde et il a des tas de superpouvoirs. Dieu lui parle, mais il ne peut pas tout nous dire. Il doit combattre Satan. Le psychiatre parle de schizophrénie. Il y a plusieurs indices qui nous laissent croire que c'est plus qu'une psychose passagère. Mon frère n'a aucune intention de ralentir sa consommation, de prendre des antipsychotiques ou de rester à l'hopital. Et comme il n'est pas un danger pour lui même ou pour les autres pour le moment et qu'il est fraîchement majeur, il a le droit de choisir.
Alors en attendant, je suis déchirée entre la nécessité de le protéger de lui même et celle de le laisser s'adonner librement à tout ce que Dieu lui demande pour qu'il puisse avoir l'aide qu'il refuse. On a jamais envie d'imposer les choses à ceux qu'on aime, jamais envie qu'ils nous haïssent ou qu'ils croient qu'on les abandonnent et pourtant, c'est parfois le seul choix qu'on a. J'ai l'impression d'accumuler les décisions déchirantes et les positions délicates et de porter seule la responsabilité du bien être de toute la famille.
Je ne vous cacherai pas que je sens monter une colère que je crois bien légitime. Ce n'est pas la première fois que je me retrouve avec mon petit frère, complètement dysfonctionnel, sur les bras alors que je ne suis pas de ces gens qui lui ont fait du mal ou de ceux qui ont baissé les yeux devant ce qu'on lui faisait subir. Eux n'ont pas honte et ne se sentent même pas concernés. Ce sont même eux qui me pressent pour que je m'occuppe de tout sans me soutenir.
Il y a quelque chose de longtemps refoulé qui émerge et qui ne pourrait s'exprimer qu'en me défoulant à hurler une rage indicible ou en me mettant au kick boxing. Je me contente pour l'instant de courrir et de tenter de sublimer la colère qui monte.
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Edit: Alors que je terminais ce message, mon petit frère s'est rué dans ma chambre pour prier puis s'est mis à rire d'un rire indescriptible pour ensuite se mettre à entrer et sortir de la maison en hurlant à Satan qu'il allait lui casser la gueule. J'étais bien malgré moi complètement terrifiée devant cet homme bien barraqué qui semblait vouloir tuer tout ce qui se mettrait sur son passage. Deux minutes plus tard, la police et l'ambulance venaient le chercher. Ils ont du se mettre à 7 pour l'attacher et il passera la nuit comme ça. Dur de supporter de voir ça.
Demain matin, on revoit le psychiatre. Je crois qu'ils vont le garder. Il me restera à ramasser ma grand-mère, qui est en dépression profonde, à la petite cuillère en espérant que ça ne l'achève pas, à convaincre ma tante qu'il ne faut pas en avoir peur et à persuader ma mère, qui arrivera la semaine prochaine, qu'il ne faut surtout pas qu'elle le décourage de se médicamenter.
J'ai besoin de dormir et j'ai besoin de vacances. Mais sinon, ça va.
vendredi 16 mai 2008
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9 commentaires:
Prends soin de TOI, très chère. Je comprends ton désarroi mais un moment donné, il faut que tu penses à toi. C'est bien beau, supporter tout le monde mais ils sont tous des adultes, il me semble. Tu n'as pas à prendre tout ce poids sur tes épaules.
Bien facile à dire lorsqu'on n'est pas dans la situation. Je sais. Mais essaie de ne pas t'oublier là-dedans.
Bonne chance! Je pense à toi.
Ecoute, je ne sais pas vraiment comment commencer... c'est que je te lis presque tous les jours et j'ai l'impression - tel un voyeur -de suivre ton évolution, ta guérison, de voir la chenille, en pleine métamorphose - devenir papillon...
Je vis en Bolivie et je t'avouerais que te lire m'aide à mettre des mots sur mes propres maux. D'une certaine façon tu me soutiens. Tu es quelqu'un de super sensible mais je sens que tu as une capacité de résilience extraordinaire.
En tous cas, je te souhaite plein de courage pour ton frère. Surtout rappelle toi que la tienne de vie est déjà bien lourde, complexe et que tu dois adopter une certaine distance malgré tout.
Merci encore d'écrire ces textes super émouvant.
Merci Souimi et anonyme pour vos mots. Ça me touche!
Je sens qu'il faut bien faire attention à moi dans tout ça. Ne vous faites pas de soucis, c'est quelque chose que j'ai appris nécessaire avec le temps... De toute façon, on aide mal quand on est vidés...
Mon petit frère a été mis en garde préventive hier. Il était bien blessé par le fait que je soit sa soeur, que c'est moi qui ait appelé la police pour le rammener à l'hopital et que je "doute" de ses visions et de sa filiation directe avec Dieu...
Mais on a bien parlé et je lui ai fait comprendre qu'il avait bien le droit d'être en colère, que c'est normal, mais que le fait que je crois que son cerveau lui joue des tours ne change rien au fait que je l'aime, que je le trouve fort et intelligent et qu'il sera toujours pour moi le même gars que j'ai toujours connu.
Au final, il comprenait mon point, même s'il soutenait que j'allais finir par le croire quand il deviendrait le roi du monde et qu'il m'offrirait les temples mayas que je vais visiter bientôt...
Dans son aile, tous les employés sont super gentils et habillés en civil. Ça n'a pas l'air d'un hopital.
J'ai trouvé les gens là-bas très touchants. Mon frère sympatisait déjà à mon départ avec un gentil garçon à l'air très cool que j'ai au départ pris pour un employé. Il est plutot bipolaire et reste volontairement dans l'aile depuis un mois.
Il a dit a mon frère qu'il le comprenait parce qu'ils sont dans le même bateau et qu'il faut s'entraider, et qu'il allait lui expliquer pourquoi c'est important d'accepter qu'il est malade et qu'il doit se soigner.
Ça me soulage que mon frère, si influençable, ait là=bas un ami qui puisse avoir une bonne influence sur lui.
Je retourne le voir ce soir. En attendant, je vais jouer dans mes fleurs et faire du vélo! Mon amoureux, en plus de me soutenir, de nous transporter et d'être dans ces moments là un allié formidable, a fait toutes les tâches ménagères hier. J'ai beaucoup de chance dans cette vie!
Allez, bonne journée!
Vertige
xx
Décidément je trouve que tu t'en sors super bien par rapport à ton environnement familiale dysfonctionnel.
Finalement la surconsommation alimentaire t'aura surment donné une force pour surmonter tout ça, survivre et vivre ta vie :)
Repose toi bien
Occupe toi de toi et préocupe toi de toi.. profite de ton chéri en passant :)
bizzzzzzzzzzzzzzzzz
Pas facile comme situation, dur pour les nerfs... Et je sais de quoi je parle...
L'important est de demeurer en contact avec soi et ne pas s'isoler... Ne pas s'oublier!
Il n'est pas facile aux jeunes adultes d'accepter la maladie, avec le temps les choses s'améliorent!
Voilà, je suis tombée sur ton blog par hasarde et sur ce message en premier. Ce n'est pas facile, mais quel courage et quelle maturité! Tu réagis vraiment bien par rapport à ton frère. Pourrais-tu nous dire comment soigne le psychiatre dans ce cas ? Dit-il à ton frère que ses propos sont incohérents, ou bien essaye-t-il de ne pas le contrarier ? C'est toujours utile de savoir comment réagir dans ces cas-là... Merci pour ton témoignage et bon courage? Je souhaite aussi une bonne santé à ton frère
Sablogine: Ce n'est pas la surconsommation alimentaire qui m'a donné de la force, ce sont les coups durs qui m'ont rendue plus forte et plus fragile à la fois. Je crois que dans toutes les situations, on a quelque chose à apprendre et qu'au final, j'ai beaucoup de chance d'avoir pu tant apprendre! La surconsommation alimentaire, ce n'est rien d'autre que de l'évitement, et c'est quand on arrête d'éviter qu'on a l'espace pour puiser la force qu'on a déjà en soi!
Miss Patata: J'espère bien que les choses s'amélioreront avec le temps... En attendant, j'essaie de protéger mes propres nerfs mais je n'y peux rien, j'y pense sans arrêt et j'y rêve la nuit. Ça commence à aller mieux et je commence à me resituer dans tout ça plutôt que d'être occuppée constament aux besoins des autres!
Si tu es passé au travers, c'est donc possible! J'espère juste qu'il pourra être autonome...
Anonyme: Je ne sais pas trop. Nous avons vu 3 psychiatres jusqu'ici mais ils avaient tous des approches bien différentes. Celui que j'ai le plus apprécié prenait le temps de le traiter comme une personne et pas comme un malade et se mettait à son niveau pour lui expliquer les choses. Nous rencontrons pour la première fois le psychiatre qui va le suivre demain... C'est donc à suivre.
Merci à tous pour vos bons mots!
Vertige
xx
J'ajoute depuis mon côté de l'océan toutes mes paroles d'encouragement et admiration pour ton courage.
Merci encore pour ta sincérité et prends bien soin de toi
Muriel
Merci Muriel,
Ce n'est opas autant de la sincérité qu'un besoin d'extérioriser tout ça.
xx
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