vendredi 8 février 2008

Plaisir et liberté

Et si je parlais de plaisir aujourd'hui?

Les plaisirs de la table ne sont jamais très loin des retrouvailles humaines. Depuis que je ne passe plus mon temps entre régime et pré-régime (vous savez, cette période ou on mange tout ce qu'on ne mangera plus au régime, qu'on en ait réellement envie ou pas?), je profite pleinement de la liberté, celle qui me permet de me concentrer sur ceux qui mangent avec moi et sur le plaisir que j'ai à être avec eux et à manger toute sorte de bonne chose plutôt que de penser à ma ration quotidienne de pain que je suis en train de dépasser, au gras caché du plat ou au fait que je suis en train d'absorber d'horribles glucides que je devrai aller brûler au gym demain en faisant le calcul de combien jours consécutifs je devrai passer sur le tapis roulant pour brûler ce gâteau au fromage que je déteste avec tout mon amour.

Que dire de l'épicerie. Quelle calvaire de scruter chaque étiquette à la recherche d'une trace de glucide pour ne pas déplaire à Atkin, de trouver des marques autorisées pour ne pas déplaire à Minçavi, de calculer sur le champ le pourcentage de gras pour ne pas dépaire à Suzan Powter, etc, etc (je ne ferai pas le tour quand même de tout ceux à qui j'ai pu vouloir faire plaisir, il y en a trop) Qui aurait pensé qu'il était possible de me faire plaisir à moi aussi. A moi tout court!

J'en était rendue à croire que le summum de mon plaisir gustatif pouvait se trouver dans une insipide crème glacée sans gras sucrée aux machins pas bon et cancérigènes. Ça, au moins, ça avait un minimum de goût (vraiment, un minimum), ça me permettait de me faire croire que je mangeais comme les autres et ça ne me donnait pas de culpabilité.

Je me souviens d'une réunion Minçavi ou j'avais demandé à la conférencière si je pouvais manger des pouddings sans gras déjà préparé plutôt que de les faire moi même. Comme elle hésitait, je lui ai fait remarqué qu'ils étaient tellement meilleurs. J'aurais du me taire. Elle m'a alors appris une leçon commune à bien des régimes: si c'est meilleur, ayez des soupçons, n'en mangez pas.

Ou cette autre fois ou je me suis fait dire que je n'avais pas maigri parce que je ne suivais pas le programme... en effet, quelques fois par semaine, je remplaçais un pain par un lait, ou l'inverse, en prenant bien soin de garder le nombre de calories constant, ou moindre. Adapter toutes mes recettes, même celles qui ne contenaient que des aliments autorisés, ça me rendais folle.

Mais minçavi, c'était quand même moins pire que passer une heure par jour sur mon ordi à planifier scientifiquement mes repas à la bouchée près, que de séparer les glucides de mes protéines ou que d'essayer de faire comprendre à mon entraineur que de manger exactement la même chose tous les jours ne pouvait pas être équilibré et que je refusais de le faire un seul jour de plus.

Ah, la liberté. Juste pour ça, toute cette démarche en vaudrait infiniment la peine.

Je travaille au marché Jean-Talon, bâtard, et si j'étais au régime, je devrais aller à l'épicerie et manger des trucs en boîte hypertransformés ou moins frais pour pouvoir compter mes calories ou m'assurer d'avoir ma dose quotidienne d'aspartame?!? Mais j'haïs les math et j'aimerais vivre vieille et en santé!

Et j'adore les bons produits, ceux de l'artisan et du fermier, ceux qu'on ne vient pas bourrer d'additifs, ceux dans lesquels il y a du gras s'il en faut, qui font plaisir aux papilles, à la tête, au corps et à l'économie locale. Et s'il y a bien une façon de manger santé, c'est celle là!

Comment en est on arrivé à penser que light = santé? Quand je vois des produits avec le logo healthcheck parce qu'ils contiennent de l'aspartame ou son nouveau copain, le splenda, j'ai presque envie de faire une extrémiste de moi même et de faire du piquetage devant mon épicerie.

Je suis une fan de livres de cuisine et j'apprécie aussi la cuisine "santé". Toutefois, ça me rends dingue quand je me rends compte que dans certaines publications, santé est égal à faible en calories. CE N'EST PAS VRAI, c'est tu clair?!! Même que les régimes hypocaloriques les mieux construits sont déséquilibrés.

Manger santé, c'est avant tout écouter les besoins de ses propres cellules. C'est le corps qui fait et répare le corps. Il sait! On sait!

Notre société individualiste qui ne veut plus de religion ni de maître se laisse encore dicter par d'autres quoi manger et comment le faire, c'est quoi ce délire?

Pourquoi a-t-on clairé le clergé dehors si c'est encore pour se faire dire quoi faire? Au moins quand ils nous disaient de ne pas faire de cochonneries avant le mariage, on pouvait encore le faire en cachette et le gouvernement ne faisait pas de campagnes de pub pour nous dire de rester chaste pour notre santé. Et quand on y pense, ça évite quand même bien de la détresse, la chasteté, mais qu'est ce qu'ils ont tous contre notre plaisir, hein, je vous le demande.

Maintenant qu'on enseigne plus la religion dans les écoles, on enseigne le guide alimentaire canadien. J'ai rien contre cette bible de l'alimentation, seulement comment apprendra t-on aux enfants à ne pas oublier la base, leurs signaux de faim, ces signaux que des tas de publicitaires alimentaire voudrait leur faire oublier, ces signaux qui sont leur meilleure arme contre cette "épidémie" de morale et de manque de contrôle de soi, j'ai nommé la méchante obésité?

Ne vous sentez vous pas en état de péché honteux lorsque vous mangez un truc bien gras en public. Oseriez vous le faire au gym, nouveau temple sacré de notre morale?

Interdire au gens ce qui peut potentiellement leur faire du mal en excès, c'est nous prendre pour des imbéciles, mais s'il fallait le faire pour ces raisons, ce sont les diètes que je rendrait illico illégales.

(J'aime bien m'emporter de temps en temps. Imaginez quand je parle de guerre, d'exploitation ou d'inégalités... )

Sur ce, je m'en vais faire un accro à la morale: je m'en vais dîner, et ça risque d'être autre chose que de la salade sans vinaigrette avec 100g de poisson blanc sec. Vivement une autre révolution tranquille!

2 commentaires:

Anonyme a dit…

C'est exactement ce que je pense depuis quelques années: ce qu'on appelle "l'alimentation santé" est devenue la nouvelle religion, avec ses dogmes (qu'on ne discute pas, par exemple "les légumes ne sont bons pour la santé que cuits vapeur sans beurre ni sel"), ses rituels (la préparation des recettes Minçavi, la lecture des étiquettes à l'épicerie) et son clergé (l'association des médecins contre l'Obésité, dont aucun ne pense apparemment à s'attarder à la question de la faim et de la satiété, et bien sûr les profs d'éducation physique et les entraîneurs de gymnase, dont ton prof préféré (sarcasme)); ainsi que bien sûr ses péchés véniels (un morceau de fromage non "allégé) ou mortels (du chocolat, des chips, des frites, un trio McDonald).

Pour moi, qui aime beaucoup déjeuner au restaurant quand ça adonne, c'est le "déjeuner santé", inévitable sur le menu, consistant habituellement en une variation de fruits frais (à part Chez Cora, j'ai une grosse méfiance sur les fruits servis au resto), d'oeuf poché ou d'oeuf dur(j'ai jamais réussi à aimer ça - pourtant j'ai essayé!), de rôtie ou muffin anglais sans beurre et, mon horreur suprême, de fromage cottage. Je sais qu'il y a des gens qui aiment sincèrement ça, mais moi "chu pâs capabe", comme on dit en bon québécois. Vive une bonne omelette western avec des toasts beurrées (quand ça me tente, et que j'ai faim, bien sûr).

Lâche pas, Anick, c'est toujours un plaisir de te lire.

Suzie

Vertige a dit…

Contente de te lire aussi et de constater que je ne suis pas seule dans mon athéisme alimentaire.

xx