lundi 15 octobre 2007

Culpabilité

Ces jours-ci, je me plonge à fond dans le subconscient de mes émotions.

Suite à vos commentaires si constructifs sur "junk et culpabilité", je me suis mise à réfléchir sur ma culpabilité, celle qu'on semble toutes éprouver à divers degré.

J'ai envie de vous répondre même si j'aurais pu garder cette réponse pour moi. Peut-être que j'ai envie de dire au monde que je ne suis pas si coupable que je pense l'être. Et après tout, ici c'est facile puisque je ne vous cotoie pas.

Je me suis demandé si ma culpabilité avait rapport avec la bouffe. Puis me plongeant dedans (facile puisque ces jours ci, elle s'impose...) j'ai réalisé que ça n'avait rien de rien à voir avec la bouffe.

La bouffe me donne seulement une excuse pour me sentir coupable et c'est plus facile de gérer ça que de me sentir coupable pour tout et rien sans savoir pourquoi.

Il y a des jours ou je me sens coupable de vivre, d'exister, de respirer l'air que je pourrais laisser à d'autres. Il y a toujours au fond de moi de façon plus ou moins consciente ce sentiment d'être de trop.

J'ai bien des idées d'ou ça peu venir mais ça fait si longtemps que je me sens comme ça que je n'ai même pas le souvenir de m'être sentie autrement. Plus encore, ce sentiment fait partie de mon identité. Je ne sais pas comment vivre autrement. J'ai grandi avec l'idée qu'il faudrait au moins que je sois utile aux autres. Je suis profondément non individualiste parce que pour moi, je ne suis rien.

J'ai beaucoup exploré ça avec ma psy ces derniers temps: l'impossibilité d'être lorsque j'étais dans ma famille. Le rejet aussi.

Lorsque j'ai commencé à avoir une personnalité et à l'affirmer, et malheureusement ou heureusement pour moi, j'en ai toute une, ma mère ne l'a pas pris. Elle a jetté tout son dévolu et son amour sur mon petit frère avant de le rejeter aussi à l'adolescence. Même chose pour mon père. Je ne l'aimais pas, il le savait et me le rendait bien. J'étais différente d'eux. J'aimais l'école, je n'était pas délinquante. Et au fond, je n'arrive toujours pas à comprendre pourquoi ils ne m'aimaient pas. Je crois que j'ai gardé de là la culpabilité primaire de croire que je suis intrinsèquement quelqun que les gens n'aiment pas. J'ai beau savoir que ce n'est pas vrai, ça reste gravé.

Et pour beaucoup de gens de mon petit village, je n'étais pas une fréquentation acceptable pour leurs enfants puisque j'étais "génétiquement programmée" pour être comme mon père (un toxicomane qui fait des banques, ça se remarque dans une petite région) et que, même si j'étais une enfant allumée, docile et gentille, "ça allait finir par sortir". Je me sentais bien coupable d'être qui j'étais et je ne pouvais absolument rien y faire. En plus, on était pas riche et j'étais mal habillée, pas sure de moi, j'avais de grosses lunettes horrible. Mon primaire, je l'ai passé toute seule avant que mon caractère me donne le droit d'être plus populaire au secondaire, mais je ne me suis jamais sentie comme les autres et même si on m'aimait, je me disais qu'on m'aimait pour ce que j'apportais et pas pour ce que j'étais. Je ressent encore ça.

Dans la même période, celle de l'adolescence, j'avais beau rapporter les meilleures notes, m'impliquer dans toutes les causes et n'être pas très difficile, c'était la guerre avec ma mère. Ma mère est une personne qui peut être très méchante et manipulatrice mais en même temps, une personne très fragile. Je me suis toujours sentie responsable de son équilibre. A cette période, on a eu des engueulades horribles. Je ne pouvait plus prendre d'elle celle sur qui elle passait ses humeurs et de me faire dire que je manquais de reconnaissances pour elle qui avait gaché sa vie en s'occupant de moi alors que j'essayais bien de montrer toute la grattitude au monde mais que parfois, il pouvait m'arriver d'oublier de ranger mes bottes ou de casser un verre sans que ce soit un manque de grattitude.

J'ai été tellement méchante plusieurs fois, à lui dire des vérités qu'elle ne voulait pas entendre mais je devais me défendre au moins un peu et, sur le coup, ça me faisait du bien de pouvoir dire ce que je pensais. Une petite réplique voulait souvent dire des heures à me sentir coupable alors qu'elle pleurait dans sa chambre et que je devais ensuite la ramasser à la petite cuillère par ma faute, pour avoir dit une parcelle de mes pensées que dailleurs, je pense encore. Ensuite, alors que tout semblait correct, mon beau père revenait de travailler, ma mère lui racontait que j'avais été méchante sans entrer dans les raisons, et là, je ne pouvais que me taire et encaisser avec une arrogance dans le regard qui me donnait droit à plusieurs coups supplémentaire mais qui me préservait. Il n'a pas réussis à me soumettre comme il l'a fait avec mon frère et ma mère. Lui montrer, ça m'a formé à la vie.

Souvent, ils en avaient marre de moi et m'envoyaient ailleurs. Plus jeune, ma mère se contentait de m'emmener en voiture et en me disant qu'elle allait me porter à la DPJ, là ou je pourrais avoir bien honte d'être avec les autres enfants méchants que les parents ne veulent plus garder. Ça me semblait un endroit horrible et ça me faisait suffisemment peur pour que je disparaisse et m'abstienne de respirer pour ne pas déranger. Souvent, on allait que diner au resto et elle était gentille. Ça me fuckait complètement la tête de ne pas comprendre pourquoi elle voulait me donner et de la voir si gentille avant de le faire. Il devait y avoir un méchant dans l'histoire et si ce n'était pas elle, c'était moi. Alors je devais être encore plus gentille que gentille puisque j'étais coupable. De quoi???

Par la suite, vers 11 ans jusqu'a 15, je revenais de l'école et mes valises étaient prêtes. Souvent, je ne savais même pas ce que j'avais fait alors je me suis mise à penser que même si j'étais une ado parfaite, j'avais quelque chose à l'intérieur d'haïssable. Les gens de ma famille adorait m'avoir et j'étais tellement bien chez eux que j'aurais voulu être de leurs enfants, mais je finissait toujours par retourner chez ma mère puisque je sentais tellement que je dérangeais leurs habitude. J'essayais d'être invisible mais je ne l'étais pas. J'essayais d'aider avec les enfants et le ménage mais ils devaient acheter plus d'épicerie pour me nourrir. Je me sentais de trop, et très coupable et je braillais tout les soirs tout en étant le plus souriante et agréable possible le jour. Ça aussi, ça m'a rendue forte et j'ai appris à pouvoir être heureuse quand je le décide, mais le bonheur semble étrangement lié à la culpabilité d'exister. Quand je suis heureuse, il y a un coté de moi qui se sent coupable, et je me met toujours à penser à ceux qui ne le sont pas. Ça donne une raison à mon propre sentiment.

Je n'arrive pas à me défaire de cette culpabilité puisque j'ai beau savoir aujourd'hui que les enfants sont parfois bien vulnérable face à leur parents qui auraient probablement du ne pas l'être, je n'ai pas toujours pas accepté de ne pas avoir su apprivoiser mes parents, de ne pas avoir été une enfant que les autres aiment spontanément. J'ai été bien forte, je m'en suis bien sorti, mais je n'ai pas été parfaite. Je sais que ce n'était pas possible mais je le voudrais.

Pour que cette souffrance ait un sens et comme je ne peux ni ne veut en vouloir à personne puisqu'ils ont surement leurs raisons, la seule personne que je conçoit assez forte dans toute cette histoire pour avoir pu faire mieux, c'est moi. Je suis la seule personne sur qui j'ai un controle et la seule à avoir pu changer mon monde et je ne suis pas arrivée à le faire.

La pire rage pour moi, c'est l'impuissance. Et même si l'impuissance est parfois un fait, je me sens coupable de tout. Le controle de moi même est quand même ce qui m'a permi de garder une certaine valeur à mes yeux et d'arriver à être adulte même quand j'étais enfant, à avoir des valeurs, à comprendre mes parents et à me dire qu'ils avaient tord, à pardonner, à me bouger dans la vie, à aller au delà de ce que je me croyais capable, à grandir, à être fière. Sans contrôle, c'était le gouffre.

Et c'est encore de cette façon que je perçoit la perte de contrôle, même si j'en ai parfois besoin. Une crise alimentaire, c'est se jetter dans le gouffre et aller à la rencontre de mon coté fragile et vulnérable. Et quand je ne fais plus de crise, je ne sais plus ou me jetter. Hier, encore cette sensation diffuse de culpabilité et je suis retourner jouer au tennis. Je ne peux pas rien faire lorsque cette sensation me submerge, c'est intenable. Le tennis, ça a un coté agressif qui me fait encore plus de bien lorsque j'accepte d'être agressive. Je ne suis juste pas encore assez bonne pour tuer la balle comme je le voudrais.

Bon, assez de mélodrame, je déteste ça. Désolée pour vos yeux.

5 commentaires:

La Souimi a dit…

Ton histoire est bouleversante. Lorsque j'ai commencé ma thérapie alimentaire, ma nutritionniste m'avait suggéré de beaucoup écrire et de creuser, m'attarder longuement sur tous les événements du passé refoulés pour bien comprendre mon histoire. De plus, elle m'a suggéré de très bons livres aidant à interpréter les raisons de nos émotions présentes mais aussi, à les vivre sereinement plutôt que de voir des bulles d'inconscient qui pètent à tout bout de champ. Je vais faire le tri des lectures qui ont été les plus significatives pour moi et je vais te faire parvenir les titres.
Merci pour ton poignant témoignage.

Vertige a dit…

Merci Souimi!

Je prendrai tes références avec plaisir lorsque tu aura le temps. J'ai tellement de bulles d'inconscient qui pètent ces temps ci que je me sens comme un seven up frais ouvert. Mais je dois dire que je me sens mieux, qu'en analysant, ça passe pas si mal. Quand ça remonte, c'est probablement pour sortir.

myrtille81 a dit…

C'est dur ce que tu écris,tu dois te sentir bien d'avoir ananlysé tout ça, de connaître les principales causes de tes crises.

Et tu dois effectivement être quelqu'un de forte pour avoir surmonté tout ça. Mais à voulaoir être forte de caractère, on devient fort physiquement ! est ce que ces kilos aident à tou gérer ? Est ce un moyen de montrer ses faiblesses, une sorte d'appel au secours pour dire qu'on a des faiblesses et besoint des autres aussi ? Je me pose souvent la question.

Vertige a dit…

Allo Myrtille,

J'ai beau me connaitre un peu plus, et ça fait du bien, je n'arrive pas encore à bien cerner le pourquoi de mes crises. Ça reste flou.

Être forte physiquement, ça a été bien des choses pour moi je crois. Premièrement, une pénitence à mon imperfection, ensuite une faille necessaire à ma perfection pour souffler et surtout, une défense des autres. Je me suis crée un mur sur mon corps comme j'en ai un dans ma tête.

Mes kilos, comme tu le dis, c'est peut-être un moyen de dire aux autre que je suis aussi faible, mais c'est aussi pour moi une excuse que je peux prendre pour ne pas être aimée. Je peux supporter qu'on ne m'aime pas parce que je suis ronde mais comment supporter qu'on ne m'aime pas moi? C'est véritablement une protection qui a été tellement necessaire à mon équilibre intérieur. Lorsque cette peur du rejet sera guérie vraiment, j'aurais la possibilité de maigrir sans me sentir hypervulnérable je crois.

A bientôt!

Anick

Anonyme a dit…

Ouahou ! Alors ça... Je n'y avais pas pensé, mais peut-être bien que cette phrase "Je peux supporter qu'on ne m'aime pas parce que je suis ronde mais comment supporter qu'on ne m'aime pas moi? " peut s'appliquer à moi. À méditer. Merci pour cette nouvelle piste. Me permets-tu de la partager avec d'autres bloggeuses ? On se retrouve pour parler de nos compulsions sur ce blog, si tu veux jeter un oeil. http://motivonsnous.blogspot.com/
Bises