samedi 15 septembre 2007

Les autres

Aujourd'hui, je suis encore revenue de mon cours avec une boule dans la gorge.

Vous devez vous dire: bon, elle ne va pas encore nous livrer les états d'ame de son moi profond!

Ben oui.

Les petites natures comme moi ont besoin d'écrire pour se comprendre comme elles n'ont pas de psy et n'assument pas comment elles se sentent parfois. C'est la vie.

Mes cours du samedi sont difficile. (et pas seulement parce que c'est samedi et que je dois quand même me lever...) Ils sont difficile parce que je suis avec des gens que je ne connais pas avec qui je dois faire plein de travaux d'équipe, livrer mes impressions, interragir.

Personne la-bas ne dois croire que je suis timide, je lead mon équipe dans les travaux, je donne mon avis lorsque la prof pose des questions et participe. Pourtant, les gens me terrorisent et je passe la journée à stresser. Manger toute seule le midi m'épuise mentalement et pourtant, jamais je n'oserais aller m'asseoir avec d'autres de mon cours. L'improbable possibilité qu'ils ne veulent pas de moi m'est insupportable.

Ces situations me rappellent tellement une petite fille un peu ronde, pauvre, que sa mère un peu dingue habillait à la St-Vincent de Paul avec un père que tout le village connaissait pour le célèbre braquage de la caisse populaire (dans un petit village comme le notre, c'était une idée de dingue, surtout que la caissière était sa cousine) et d'autres frasques malheureusement célèbres. Et même si la petite fille était parfaite et sage comme une image, tout le monde disait qu'elle allait surement tourner comme ses parents, "c'est génétique ces affaires là". Certains enfents n'avaient pas le droit de jouer avec elle et les autres, ça ne les intéressait pas de toute façon d'être amis avec une petite grosse laide trop bonne à l'école. Alors elle jouait toute seule et la pire honte, c'était que les autres le remarquent. Le problème quand t'es un rejet, c'est que c'est contagieux. Quand on est petit, on pense que c'est sa faute, qu'on a quelque chose au fond de soi qui fait que personne ne nous aime.

Bien sur, j'ai grandi et j'ai eu une foule d'amies au secondaire. Malheureusement, je les ai toutes abandonnées à la fin puisque mon nouveau beau père et ma mère rendaient mon habituelle bonne humeur impossible à se manifester et que je ne voulais pas imposer ma tristesse aux autres, à ces amies en qui j'avais confiance. Je ne peux pas dire pourquoi je ne leur ai pas parlé de ça alors qu'on se parlait de tout. Je me suis rangée avec la bande "rivale" de la mienne puisqu'avec elles, il n'y avait que des futilités et des discussions de garçons et de maquillage. Ça me faisait penser à autre chose. Puis évidemment, je ne les ai pas revu à la fin du secondaire.

Sont venus les amis de couple, ceux qu'on perds quand il n'y a plus de couple par choix ou par la force des choses. Et aujourd'hui, j'ai des tas de connaissances, d'amis de couple, d'anciens colocs mais des amis véritable, aucun.

Mon "amie" la plus fidèle, c'est cette incapacité à approcher les gens et cette crainte du rejet surement batie au primaire mais toujours bien là. Et elle est tellement présente quand je ne me gave pas pour la faire taire.

J'ai revu ma mailleure amie du secondaire il y a de cela 2 semaines, le jour de mon saut en parachute. Elle faisait une vente de garage dans notre village natal. Je suis allée la voir quelques minutes, prendre de ses nouvelles, j'étais intimidée mais ça m'a fait plaisir de la voir et je crois qu'à elle aussi. Elle vient de perdre son père; il s'est suicidé. J'ai fait comme si je ne le savait pas puisque je ne savais pas quoi lui dire et que surtout, je ne voulais pas qu'elle pense que je suis allée la voir par compassion. Sa mère était là. Qu'aurais je pu dire qui soit approprié à un tel drame. Je n'ai pas su.

J'ai appris qu'elle habitait près de chez moi à Montréal. Je lui ai proposé de venir souper chez moi et lui ai demandé son email. Elle me l'a laissé sur un bout de papier, avec son numéro de téléphone. Depuis, ce bout de papier traine sur mon bureau mais je n'ai pas osé lui écrire. J'ai peur d'être déçue, qu'elle ne tienne pas à ces vieilles histoires autant que moi ou que ça ne soit plus comme avant.

Mais je crois que ce soir, je vais oser. Au pire, je serai fixée.

Après tout, sans dénigrer la petite fille du primaire et sa peine, il est temps de grandir sans me cacher de mes peurs.

3 commentaires:

La Souimi a dit…

Je suis très touchée par ton billet. Si tu savais.....

Je te souhaite d'oser. D'oser contacter ton amie. Le pire, c'est qu'elle refuse. Mais je ne crois pas qu'elle va refuser.

C'est vrai que c'est très pénible de subir la lourdeur de l'exclusion lorsqu'on n'est pas connu. Mais tu sais, ce que tu as vécu enfant a été vécu par des enfants. C'est très cruel, le monde des enfants. Sans le vouloir, souvent.
Mais maintenant, si tu regardes ta réalité avec des yeux d'adulte, le mal de l'enfance appartient au passé. Ça va être cool maintenant. Il me semble que oui. Plus cool. Plus respectueux.
Si je me fie à ce que je connais de toi, par le biais de tes mots, tu écris très, très bien. Tu te connais beaucoup. Tu es très honnête dans tes propos. Alors, dans la vraie vie, tu dois être aussi formidable. Les gens vont être heureux de te connaître. Comme moi, je le suis.

Anonyme a dit…

Tu n'as pas avoir peur, l 'avantage du mail, c'est que tu n'ai pas la personne en directe (au contraire du téléphone). Donc, aucune humiliation ou situation ambigue, au pire, si elle n'est pas interressée elle ne te répondra pas!
Courage, mais j'imagine que celà puisse être difficile au travers de ce que tu as vécu...

Vertige a dit…

J'ai beaucoup fait la paix avec mon enfance à travailler avec des enfants. Je me suis reconnue dans des petits exclus adorables qui n'avaient rien fait pour le devenir. Ce que j'ai vécu m'aura fait grandir: il n'y a pas de souffrances inutiles si on en tire le meilleur (écrire ça pendant que je suis en train de travailler sur les famines me semble complètement inapproprié mais passons, moi j'ai besoin de cette idée que le monde est un peu juste malgré tout)

Merci de tous ces gentils mots Souimi. Ça me touche. Je prends peu à peu de la confiance en moi et mes relations avec le "monde extérieur" changent. Mais je ne perds pas mes reliques pour autant. C'est un apprentissage, comme la bouffe, comme le reste.

J'ai osé écrire à ma vieille amie. Après tout, j'avais osé aller la voir en personne alors autant continuer l'audace. Elle m'a répondu le soir même en me disant qu'elle est vraiment contente que je lui écrive et qu'elle souhaitait vraiment essayer de voir si cette amitié qu'on a laissé de coté peut marcher encore (alors que moi, je ne lui ai écrit que des généralités rigolotes et prudentes pour mon égo)

Peut-être que toutes ces années ont fait que nous n'avons plus grand chose à nous dire, je ne sais pas encore, mais au moins je sais que l'envie est là des deux coté et juste ça, ça me fait chaud au coeur.

A bientôt et bonne journée!

Anick
xx